Découvrir la méthode
Qu’est-ce que la MPPfr ?
La Méthode de la Préoccupation Partagée dans sa « version française » est bien plus que la méthode Pikas.
C’est en réalité une méta-méthode, qui englobe plusieurs approches : celle héritée d’Anatol Pikas qui fut introduite et déployée en France par Jean-Pierre Bellon dès les années 2010, et celle élaborée par Marie Quartier à partir de son expérience de l’accompagnement des élèves victimes et de leurs familles, depuis le début des années 2010 également.
Ainsi, les deux pôles du harcèlement scolaire,
élèves auteurs d’une part et cibles de l’autre,
sont pris en charge par la MPPfr
Jean-Pierre Bellon et Marie Quartier, en réunissant leurs travaux à partir de 2017, ont perçu de la même manière les écueils du système éducatif français quant au traitement du harcèlement scolaire.
Le principal écueil que l’on retrouve en permanence dans le système français est la difficulté à penser, donc à repérer, la souffrance de l’élève qui est victime des brimades de ses camarades.
Cela induit dans les discours des professionnels des maladresses dont les conséquences sont graves, puisqu’elles condamnent au silence les victimes, renforcent la solitude et le désespoir de ces élèves et de leurs familles, provoquant certains drames dont on ne comprend que trop tard qu’ils auraient pu être évités par une approche différente.
Cet écueil n’existait sans doute pas dans le contexte de travail d’Anatol Pikas, qui n’a pas eu besoin de penser le soutien de l’élève cible et de sa famille et s’est concentré sur les entretiens avec les élèves auteurs de brimades. Or, en France, négliger le travail avec l’élève cible et sa famille dans la prévention et le traitement des situations de harcèlement est une faute que la MPPfr permet d’éviter.
L’autre écueil que l’on rencontre communément est de croire que le harcèlement peut se résoudre par une bonne éducation des élèves ou par la transmission de compétences psychosociales, sans prendre conscience du pouvoir régressif du groupe sur les individus les mieux éduqués.
La MPPfr permet de ne pas tomber dans ce piège et de libérer tous les élèves de la tyrannie du groupe, si prégnante dans leur vie, afin de les tirer vers ce qu’ils ont de plus élevé dans leur personnalité.
La Méthode de la Préoccupation Partagée a donc été refondée par Jean-Pierre Bellon et Marie Quartier en MPPfr, par la réunion de deux approches complémentaires, qu’ils ont développées chacun pendant des années avant de se rencontrer.
La main secourante est essentielle pour sortir l’élève cible de son isolement et de sa culpabilité afin qu’il reprenne confiance en lui et qu’il retrouve sa place dans un groupe pacifié.
Ensemble, ils ont en outre repensé et approfondi les fondements théoriques
qui sont essentiels pour comprendre la nature du harcèlement scolaire
et donc prévenir son apparition, mais ils ont également affiné les conditions de réussite de la Méthode
et ses limites dans les différents contextes éducatifs.
Ils ont par ailleurs déterminé une temporalité précise, levé l’ambiguïté sur l’aspect non-blâmant
et clarifié le rapport à la sanction.
Découvrir la méthode
La MPPfr : une éthique bien plus qu’une technique
La Méthode de la Préoccupation Partagée, version française : MPPfr, est ainsi une libre adaptation de la méthode créée par Anatol Pikas qui a été refondée et enrichie par Jean-Pierre Bellon et Marie Quartier.
Elle s’appuie sur deux valeurs cardinales et éducatives :
le respect des élèves et la croyance en leur capacité à devenir meilleur.
Les évaluations dont elle a fait l’objet montrent qu’elle permet de résoudre près de 8 situations de harcèlement scolaire sur 10.
Cette méthode a pour but de lutter contre le harcèlement par deux leviers :
- Accompagner l’élève cible afin de le soutenir
- Travailler avec les intimidateurs afin de les faire changer de posture
- Un inlassable souci pour ceux qui ne vont pas bien,
- Une constante volonté d’associer les élèves au règlement des situations d’intimidation,
- La conviction que l’intimidation est un piège dans lequel n’importe quel enfant ou adolescent peut tomber, autant comme victime que comme auteur
- Qu’il est du devoir des professionnels de les aider tous à en sortir.
La Méthode de la Préoccupation Partagée est un outil mais ce n’est pas elle qui met fin au harcèlement : ce qui fait cesser les brimades, c’est le front uni des adultes déterminés à ne leur laisser aucune place et ce qui sauve les élèves victimes, c’est l’accompagnement d’un adulte bienveillant et protecteur.
Ce qui met fin aux brimades,
c’est l’intervention immédiate,
ferme et résolue des adultes.
Questions fréquentes
La MPPfr peut-elle être utilisée avec de très jeunes enfants ?
Dans les faits, on observe que c’est généralement avec des élèves de 7 ou 8 ans que les professionnels commencent à utiliser la Méthode de la Préoccupation Partagée. Avant cet âge, le message injonctif du maître peut suffire pour faire cesser l’intimidation.
Des expériences très réussies d’utilisation de la MPPfr dans des classes de maternelle ont cependant été tentées.
La méthode peut-elle être utilisée ailleurs que dans le cadre scolaire ?
La Méthode de la Préoccupation Partagée peut permettre le règlement des situations d’intimidation dans tous les groupes de jeunes. Aussi a-t-elle pu être utilisée avec efficacité dans des clubs sportifs mais aussi dans des centres de vacances.
Un professeur de la classe où l’intimidation s’est déroulée peut-il mener les entretiens ?
Il est préférable que l’intervenant soit extérieur à la classe. Il importe que celui qui mène les entretiens n’ait pas une connaissance précise du groupe avec qui il va travailler afin de pouvoir aborder la situation avec neutralité. Les élèves, de leur côté, se sentiront plus à l’aise pour parler avec un professionnel extérieur à la classe. Lorsqu’il n’existe pas dans un établissement d’équipe vers laquelle se tourner pour traiter une situation d’intimidation, un enseignant peut avoir recours à d’autres méthodes comme No Blame ou Farsta.
La méthode peut-elle être utilisée lorsque des sanctions ont été prononcées ?
La Méthode de la Préoccupation Partagée est une approche non blâmante. Les personnels qui la mettent en œuvre ne disposent pas du pouvoir de sanction. Celui-ci appartient au chef d’établissement. Il se peut que dans certains cas le recours à la sanction soit nécessaire. Deux situations peuvent être envisagés :
1) Si les intimidateurs refusent de coopérer, se murent dans le silence, ne font aucune suggestion et persistent à intimider la cible, la méthode est alors abandonnée et le chef d’établissement sanctionne les intimidateurs.
2) Si les faits sont particulièrement graves, des sanctions doivent être immédiatement prononcées.
Mais on sait que celles-ci mettent rarement fin à elles seules à l’intimidation. L’équipe chargée du traitement des situations peut parfaitement travailler avec les intimidateurs après qu’ils ont été sanctionnés.
La méthode a-t-elle fait l’objet d’évaluations concernant son efficacité ?
La méthode de la préoccupation partagée a fait l’objet de différentes évaluations internationales :
- En 1994, P.K. Smith et S. Sharp ont testé la méthode auprès d’élèves du secondaire (Sheffield) : le taux de résolution des situations est de 75%.
- En 1996, A. Duncan a procédé à une évaluation auprès d’élèves entre 7 et 16 ans (Écosse) : sur 38 cas d’intimidations 34 ont pu être résolus avec la Préoccupation commune (soit 89%).
- En 2001, P.K. Smith a interrogé des enseignants (Royaume-Uni) sur l’efficacité de de la méthode en leur demandant de la situer sur une échelle de 1 à 5 : leurs réponses est de 3,9.
- En 2001, C. Griffiths a testé la méthode en Australie auprès d’élèves du primaire et du secondaire : les taux de réussite de la méthode se situent entre 85 et 100%.
Sources :
Duncan Alison, The Shared Concern Method for Resolving Group Bullying in Schools, Educational Psychology in Practice 12 (2), 1996.
Griffiths Coosje, Countering bullying in schools : training package, Western Australian Department of Education, 2001.
Smith Peter K. et Sharp Sonia, School Bullying, Insights and Perspectives, Routledge, London, 1994.
Smith Peter K. Should we blame the bullies? The Psychologist, 14 (2), 2001.
Existe-t-il d’autres méthodes pour traiter les situations de harcèlement scolaire ?
Deux autres méthodes ont été développées en Europe. La première est connue sous le nom de Méthode Farsta du nom d’un quartier de Stockholm où son concepteur le psychologue suédois Karl Ljungström l’a développée. Il s’agit d’une dissidence de la Préoccupation partagée. Elle en reprend les principaux aspects (approche non blâmante, entretiens individuels, recherche de suggestions…) mais elle introduit une différence importante : l’intervenant commence les entretiens en marquant fortement son opposition à l’intimidation et en exprimant son intention d’y mettre un terme. Ce modèle plus injonctif peut être utilisé par un enseignant dans sa propre classe ou encore dans certaines situations pour lesquelles la Méthode de la Préoccupation Partagée ne paraît pas adaptée (élèves particulièrement jeunes, brimades sévères…).
Deux chercheurs britanniques Barbara Maines et George Robinson ont développé une méthode connue sous le nom de No Blame Approach. Il s’agit également d’une approche non blâmante; elle ne procède pas par entretiens individuels mais par un travail avec un groupe d’élèves à qui les professionnels font part de leur de leur préoccupation pour l’élève cible. Ce groupe, au sein duquel se trouvent aussi les principaux intimidateurs, est invité à faire des suggestions pour améliorer la situation de la cible.